La discussion philosophique (type Lipman/Dewey)
(vous préférez l’audio? une conférence d’une heure pour avoir quelques repères et outils en discussion philosophiques de type Lipman)
La discussion philosophique n’est ni un cours de philo dialogué ni un débat où les participants défendent leurs opinions et argumentent pour convaincre les autres, où l’on établit qui a tort et qui a raison. Elle est une invitation à dépasser la simple opinion, à interroger les évidences et construire ses idées dans l’échange avec les autres. Véritable laboratoire de la pensée, la discussion philosophique mise en place par Matthew Lipman suit une démarche épistémologique.
Comment savons-nous (ce) que nous savons ? Comment notre pensée s’élabore-t-elle ?
Le questionnement, central dans cette méthode, se distingue par la mise en place d’une communauté de recherche : il s’agit de tester les idées et d’envisager un problème collectivement sous différents angles.
- Comprendre en groupe d’où viennent nos idées, sur quels présupposés elles reposent.
- Mettre au jour les modes de réflexion de chacun, en cerner les nuances et les différences.
- Coopérer pour affiner sa pensée, en voir les limites, la réviser…voir même changer d’avis.
- Élaborer ensemble un objet de savoir commun.
Une particularité forte de la démarche Lipman : la question n’est pas imposée, elle émane des préoccupations croisées des participants suite à un choix collectif. L’animateur crée les conditions de l’émergence de cette question en proposant une activité/mise en situation/expérimentation qui constitue l’objet commun. Le groupe se construit à partir de cet intérêt commun qui engage la mise en chantier collective de la pensée. L’animateur n’a pas de messages à transmettre, n’oriente pas le contenu des échanges mais garantit la rigueur intellectuelle de la discussion.
Celle-ci met en œuvre des habiletés de pensée liées à la pratique philosophique et à la démarche de la recherche scientifique (formuler des hypothèses, donner des exemples et contre-exemples, donner des raisons, des critères, définir, identifier des présupposés, des sophismes, rechercher des alternatives….).
Prises en charge par l’animateur, elles sont ensuite relayées progressivement par les participants : rechercher, définir, organiser l’information, évaluer les sources, pondérer…
LIPMAN SUR LE TERRAIN : REGARDER LA SERIE « DES ENFANTS PHILOSOPHENT » de Michel Sasseville (vidéos en accès libre)
Cette dynamique de recherche philosophique aide ces derniers à examiner les fondements de leur pensée (présupposés et représentations) ainsi que les implications pratiques (individuelles et collectives) des idées qu’ils élaborent. Il s’agit donc de faire prendre conscience aux participants des processus de pensée à l’oeuvre et non de conclure la discussion en formulant une réponse. Cette « absence de réponse », qui peut être déstabilisante, met en avant la recherche et son processus.
- La discussion philosophique déploie un processus résolument collaboratif – primordial pour évaluer sa pensée (la frotter à ses propres présupposés et au monde)
- une dimension sociale et politique forte permettant d’ajuster sa pensée dans ses fondements (construction démocratique).
Il s’agit de développer l’esprit critique et la pensée créative dans un cadre bienveillant et d’écoute active. Prendre le temps de s’interroger, jouer avec les si…, les hypothèses, les utopies, de formuler des alternatives, de débusquer les erreurs de raisonnement afin de goûter au plaisir de la pensée.
Elle est à la fois un outil d’animation, de formation et d’accompagnement.